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Sean Scull, SKEMA Publika : « le populisme n'est pas la cause, mais le symptôme d'une démocratie en crise »

Publié le 16 septembre 2024

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Sean Scull, chargé de projets think tank pour SKEMA Publika, s'attaque à la question du populisme dans son dernier essai. Avec une approche explicative, il démontre que ce phénomène, loin d’être une simple réaction contre les élites, révèle une profonde crise de la démocratie. Entre l’influence croissante des acteurs économiques et les politiques néolibérales imposées, Scull propose une réflexion sur les causes sous-jacentes du mécontentement populaire qui traverse de nombreuses sociétés aujourd'hui.

Votre ouvrage propose une analyse du populisme en France et en Suède. Vous avancez que ce phénomène est une conséquence de la crise de la démocratie libérale. Pouvez-vous expliquer cette thèse en détail ?

Sean Scull : Le populisme ne surgit pas sans raison. Il est le symptôme d’un dysfonctionnement majeur au sein de nos démocraties libérales, celui de la domination du pouvoir économique sur le pouvoir politique. Lorsque les citoyens se rendent compte que les décisions politiques ne répondent plus à leurs intérêts, mais sont influencées par des acteurs extérieurs comme les agences de notation ou les politiques d’austérité imposées par l’Europe, ils se tournent vers des mouvements qui incarnent une alternative. Ces mouvements, qu’ils soient à gauche comme LFI en France ou à droite comme le RN, ou encore les Démocrates Suédois en Suède, capturent le mécontentement populaire face à une démocratie perçue comme défaillante.

 

Vous êtes dans une démarche explicative dans votre essai. Que souhaitez-vous clarifier à travers vos travaux ?

Mon objectif est de montrer que le populisme n’est pas simplement une réaction irrationnelle ou une révolte contre les élites. C'est une réaction logique à un système qui, depuis des décennies, met de côté la souveraineté populaire. Les décisions publiques sont de plus en plus dictées par des impératifs économiques externes, souvent sous la pression des agences de notation ou des directives européennes en matière d’austérité. Il est donc essentiel de comprendre ce contexte pour saisir pourquoi les mouvements populistes gagnent du terrain.

 

Vous avez étudié le populisme en France à travers des partis comme La France Insoumise (LFI) et le Rassemblement National (RN), ainsi qu’en Suède avec les Démocrates Suédois et le Parti de Gauche. Quelles similarités et différences avez-vous observées entre ces mouvements ?

Bien que ces partis aient des idéologies très différentes, ils partagent tous un rejet des élites et de la mondialisation néolibérale. En France, le RN et LFI critiquent tous deux ce qu’ils perçoivent comme une perte de souveraineté nationale, mais à travers des prismes différents : LFI met l’accent sur l’écologie, la justice sociale et la lutte contre les inégalités, tandis que le RN se concentre davantage sur des questions identitaires, de sécurité et de pouvoir d’achat. En Suède, les Démocrates Suédois se rapprochent davantage du RN dans leur discours nationaliste, tandis que le Parti de Gauche partage certains des idéaux de LFI en ce qui concerne l’opposition à l’austérité et à la mondialisation.

 

Quel impact ces politiques d'austérité imposées par l'Europe ont-elles sur la montée du populisme selon vous ?

L’austérité impose des sacrifices à la population, souvent sans que celle-ci ait son mot à dire. Cela engendre un sentiment de frustration et de trahison, car les citoyens voient leurs conditions de vie se détériorer au nom de règles économiques décidées ailleurs. Ce ressentiment est exploité par les mouvements populistes qui promettent de redonner le pouvoir au peuple en brisant ces contraintes extérieures.

 

L’ouvrage Le populisme : Symptôme d’une crise de la démocratie - Comment le néolibéralisme a triomphé en France et en Suède est disponible sur le site de L’Harmattan.

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